mercredi 5 juin 2013

Rencontre barbare

C'est avant tout d’une histoire d’amour dont je voudrais vous parler aujourd’hui. Une histoire d’amour avec un pays : la Mongolie.
Mais, comme toute histoire, mon histoire a évolué, a changé, a grandi, s'est enrichie au fil des ans. Quand la musique mongole s'est joint à d'autres cultures, j'ai plongé avec elle dans ces nouveaux univers, j'en ai aimé chaque note, et c'est de ça aussi dont je voudrais vous parler aujourd'hui.

Cette histoire d’amour, comme toutes les histoires d’amour, commence par une belle rencontre, avec Bouzhigma, une jeune fille Mongole arrivée en France depuis un an. C’était en 2009.
Elle m’a fait découvrir son pays,  ses traditions et surtout sa musique. Grâce à elle, j’ai connu le morin khuur, instrument traditionnel mongol aussi appelé vièle à tête de cheval.



Bouzhigma Santaro
Crédit photo : Jean Luc Arru



Je me souviens que la première fois que j’ai entendu le son du morin khuur, je me suis dit que je n’avais jamais rien entendu de plus beau. Je le pense toujours aujourd'hui.



L'année suivante, en 2010, je découvrais « Les violons barbares » au festival des luthiers et maîtres sonneurs de Saint Chartier. Ce groupe bulgaro-franco-mongol se compose de trois musiciens, dont Enkhjargaal Dandarvaachig, un joueur de Morin Khuur.
Je l’ai par la suite revu lors de différents passages en France, notamment avec les violons barbares, mais également au sein de la formation Duplessy and the 3 violins of the world (nous allons y revenir) en 2012 et avec Sedaa, un groupe de musiciens mongols qui reprennent des airs et chants traditionnels mongols, où il était invité lors d'une fête de la musique (en 2011 je crois).





Enkhjargal Dandarvaachig
Crédit photo : Ilsée L.
Lorsque j’ai su qu’il jouait non loin de chez moi ce dimanche 2 juin, j’ai accouru pour le voir. D’autant plus qu’il se produisait au sein de la formation Duplessy and the 3 violins of the world qui m'avait déjà enchantée un an auparavant.


Cette formation musicale est née en 2009, l’année même où je découvrais la musique mongole, et se compose de quatre musiciens.


Mathias Duplessy, à l’origine du projet, a ainsi réuni autour de lui des musiciens venus d’orient, jouant chacun d’un « violon » particulier, instrument traditionnel représentatif de leur pays. 


Ce sont « les trois violons du monde ».






Le Morin Khuur pour le Mongol Enkhjargal Dandarvaachig ;


Crédit photo : Ilsée L.



L’Erhu pour le Chinois Guo Gan ;


Crédit photo : Ilsée L.







Le Sarangi pour l’Indien Sabir Khan.


Crédit photo Ilsée L.


Accompagnés à la guitare et à la voix par Mathias Duplessy

Crédit photo : Ilsée L.


Avant d’en venir au concert même, je voudrais faire une petite (et courte) présentation des différents instruments que vous allez entendre. Pas une présentation technique, mais une présentation poétique.

Sarangi signifie « cent couleurs » ou « cent humeurs ». Cette appellation lui vient du fait qu’il peut reproduire des sons avec des variations infimes. Sa sonorité, très riche comme vous l’entendrez tout à l’heure, se rapproche de la voix humaine.
Vous remarquerez que cet instrument se joue assis en tailleur. Ca me l’a rendu tout de suite très sympathique, avant même d’en avoir entendu une seule note.

Morin Khuur signifie vièle à tête de cheval, tout simplement parce qu’il se termine par une tête de cheval sculptée sur le haut du manche. Cet instrument imite le cheval.
Les deux cordes dont il est composé ont des noms : nariin et büdüün, ce qui signifie littéralement aigüe et grave. On considère qu’il y a une corde féminine, nariin, et une corde masculine, büdüün. Chacune de ces deux cordes est composée de nombreux crins, ce qui donne cette richesse au son. Nariin contient cent cinq crins de la queue d’une jument et  büdüün contient cent trente crins de la queue d’un étalon.
En Mongolie, lorsque la chamelle ne veut pas allaiter son petit, on fait appelle aux joueurs de morin khuur. Ceux-ci jouent de leur instrument, et la chamelle se réconcilie avec son petit et peut l’allaiter. De même, lorsqu’un chameau perd sa mère très tôt et n’est pas sevré, le morin khuur peut aider à faire accepter ce petit par une autre chamelle.

L’Erhu est lui aussi composé de deux cordes (Er signifie deux et rhu signifie barbare, erhu signifiant donc instrument barbare à deux cordes). L’archet est inséré entre elles. Une théorie explique que c’était pour que les musiciens cavaliers chinois puissent tenir les rênes du cheval sans que l’archet ne tombe. Cet instrument est originaire du groupe nomade appelé Xi.
Il est difficile de savoir exactement quand cet instrument est apparu, même s’il est certain qu’il a plus de mille ans.  Malgré son ancienneté, ce n’est que vers 1920 que l’erhu a volé de ses propres ailes et est devenu un instrument à l’existence propre et non plus un instrument d’accompagnement (il accompagne traditionnellement les opéras en Chine).

Je sais que cette petite présentation laisse une plus grande part au morin khuur, mais c’est que je ne connais pas la Bouzhigma indienne ou la Bouzhigma chinoise qui aurait pu me parler plus longuement du Sarangi ou de l’Erhu. Alors que de son morin khuur, Bouzhigma m’en a parlé très longuement, avec beaucoup d’amour et de passion.

Cette petite partie théorique étant terminée, place à la musique !

Le concert commence par une présentation des musiciens. Chacun vient jouer un morceau en solo.
C’est Guo Gan qui commence. Sa musique est d’abord douce, légère puis devient énergique et puissante. On termine sur un feu d’artifice de sons, le public est estomaqué, pour ma part je ne comprends même pas ce que je vois et ce que j’entends, j’en ai littéralement le souffle coupé.
Lors du tonnerre d’applaudissements qui suit, Guo Gan met humblement en avant son Erhu, afin que ce soit lui qui reçoive nos acclamations.

C’est ensuite Enkhjargaal Dandarvaachig qui vient jouer. Sur ce morceau, il nous fait découvrir trois types de chants mongols :

  •          Le chant long ;
  •         Le chant diphonique, technique vocale qui permet de produire plusieurs notes simultanément ;
  •         Le kargyyra , chant très grave, qui utilise les bandes ventriculaires (fausses cordes vocales) se situant en dessous des cordes vocales et qui, vibrant deux fois moins vite que ces dernières, produisent un son une octave en dessous.

(Vous pourrez voir un extrait de ces deux présentations dans la dernière vidéo tout en bas).

Sabir Khan demande à Mathias Duplessy de bien vouloir jouer avec lui. Il monte sur scène, et tient à la main son Sarangi qu’il tient de son père, Ustad Sultan Khan, considéré comme un des plus grands sarangistes.  Avant Sultan Khan déjà, ce Sarangi était dans la famille : il est  légué de père en fils depuis 150 ans.





Une fois les présentations faites, c’est l’heure du mélange. The 3 violins of the world est la première formation qui utilise simultanément ces trois violons d’orient.

Je vous laisse maintenant juger par vous-même de la beauté du mélange à travers ces quelques vidéos. Ceux qui connaissent déjà la formation (je pense notamment aux amis folkeux présents à Saint Chartier où les ayant vus ailleurs en 2012) remarqueront peut-être la présence de nouveaux morceaux. Un deuxième CD semble être en préparation ! 

Marco Polo




Gnossienne n°1 suivie d’un morceau dont je n’ai pas le titre



Et des morceaux dont je n’ai pas retrouvé le titre non plus







Je vous invite à découvrir la page myspace de Duplessy and the 3 violins of the world : http://www.myspace.com/duplessyandthe3violins

Je vous laisse également découvrir un  montage vidéo que Guiguite, une charmante dame rencontrée lors du concert, a mis en ligne.






Et voici leurs prochaines dates, transmises directement par Mathias Duplessy que je remercie :

2013
11 juillet (jeudi) à Gap (05)
12 juillet (vendredi) à Kalsruhe (Allemagne)
13 juillet (samedi) Les Suds, Arles (13)
21 août Huy (Belgique)
23  août Tatihou (Normandie)